Histoire:

La différence d’écartement entre les grands réseaux – dits « à voie normale », distance entre les rails de 1,435 mètre – et les lignes secondaires « à voie étroite » – pour la plupart à l’écartement de 1 mètre – empêche le transit des véhicules de l’un à l’autre; il est alors nécessaire de changer de convoi pour poursuivre sa route. S’il n’entraîne qu’un simple inconfort pour les voyageurs, le transbordement des marchandises requiert une main d’œuvre importante. Dès 1896 la conception de boggies ou « trucks » à voie étroite, sur lesquels sont chargés les wagons à voie normale, permettent de les acheminer directement à destination.
De petites locomotives à vapeur sont utilisées pour tracter ces convois, auxquelles succèdent en 1910 six tracteurs électriques, dont le n°151. Ils permettent de former des convois de 3 wagons soit environ 70 tonnes. Ce trafic connaît son apogée durant la seconde guerre mondiale. Suite à la fermeture de pratiquement tous les autres points frontières, conjugués aux besoins accrus de la population, près de 15’000 wagons sont acheminés en 1945 entre la gare des Eaux Vives et celle de Cornavin à travers la ville.
Les tracteurs sont également mis à contribution les week-ends pour le trafic des excursionnistes, ou l’hiver pour le déblaiement de la neige. De plus en plus problématique au milieu d’une circulation automobile croissante, le « service des trucks » cesse en 1955, remplacé par un service routier. Seul le tracteur 151 échappe à la démolition, transformé en véhicule de travaux. Cédé en 1972 au Blonay-Chamby, il voyage à son tour sur un « truck » à voie normale des CFF jusqu’à Vevey, d’où il gagne par ses propres moyens le musée. De nombreuses heures seront consacrées pour sa remise en état, qui lui permettent de « passer le cap » de ses 100 ans en 2010 en bonnes conditions.

Texte: J.D.Paré